L’arc-en-ciel de Belagua

Je me souviens qu’on avait loué un chalet à la station de ski de la Pierre Saint-Martin, au mois d’août. Il y avait canicule sur toute la France, mais pour nous le soir c’était polaires et chauffage obligatoires. Et brouillard tous les jours. Le fameux brouillard de la Pierre Saint-Martin, que si tu ne t’es pas égaré au moins une fois dedans, tu ne sais pas vraiment ce que c’est que le brouillard (ni La Pierre). Ah oui, et de la grêle, aussi.

Jeanne qui était en vacances avec nous n’en pouvait plus de ce temps, et tournait en rond. Nous on n’était pas très fiers de l’avoir entraînée dans ce plan hivernal, alors qu’on lui avait vanté la beauté du coin et promis de belles randos ; alors on était allés chercher le soleil en Navarre, de l’autre côté de la frontière. Parce que c’est comme ça à la Pierre : le brouillard peut te tomber dessus par grand soleil, le temps de refaire ton lacet, mais souvent tu franchis le col, et en dix mètres tu sors de la purée de pois cassés, pour émerger dans le grand soleil ibérique.
On avait donc passé une journée ensoleillée à visiter le joli village d’Isaba, siester au bord d’un torrent ; mais en fin d’après-midi il avait bien fallu se résoudre à remonter là-haut, vers le brouillard comme dans la chanson.
Un peu au-dessus du refuge de Belagua, France et Espagne nous avaient gratifié d’un magnifique arc-en-ciel. Je m’aperçois aujourd’hui seulement en regardant la photo, qu’il délimitait précisément le début du brouillard (normal, si on y réfléchit, puisqu’il lui faut de l’eau, et du soleil).
Passé le col dans l’autre sens, on ne voyait plus le bout du capot, ni le bord gauche de la route, qui n’est pas très large.