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Chez les Sudre

Publié le 9 décembre 2023

« Si vous voulez vraiment apprendre à tirer le noir et blanc, je n’ai pas d’autre conseil à vous donner que d’aller faire un stage chez les Sudre à Lacoste » m’avait dit un photographe d’Albi à qui j’avais montré mes premiers tirages.

C’était effectivement un très bon conseil. On devait être huit ou dix stagiaires ; le matin je me levais avant tout le monde pour nager nu dans la piscine face au Luberon, et ensuite on passait toute la journée sous les agrandisseurs (Durst 138, j’en ai eu un des années plus tard), au-dessus des cuvettes et dans la salle d’examen des tirages. Denis Brihat était venu nous porter des salades de son jardin.

Le soir on se détendait un peu. Il y avait dans la cuisine-salle à manger des stagiaires un tirage du célèbre Panier aux œufs de Jean-Pierre, ainsi que le vieux panier à salade qui avait servi à la photo, ou un autre du même genre, je ne sais plus.

Un jour où on avait fait une grosse omelette, quelqu’un a eu l’idée d’en faire une photo-pastiche, avec la même composition mais inversée : nos œufs cassés dans le panier, et un œuf intact à côté. On avait développé le film et fait en douce un beau tirage que l’on avait placé soigneusement dans le cadre à la place de l’autre. Bon, la photo originale avait été faite à la chambre 18x24cm, la nôtre au 24x36, le rendu n’était pas comparable, mais on n’allait pas pousser le vice jusque-là.

Ça nous avait beaucoup amusé de faire ça. Jean-Pierre avait un peu souri, sans lâcher son éternel fume-cigarette. Il m’a semblé qu’il avait moyennement apprécié la plaisanterie quand-même, comme si on avait voulu se moquer de lui, ce qui n’était pas le cas — plutôt un hommage potache.

Je n’ai pas eu le temps de faire des photos de l’environnement, sauf deux ou trois, sur ce beau film Agfapan 25 si fin que l’on n’en trouvait pas le grain sous l’agrandisseur, au scoponet.

Chez les Sudre
Lacoste, 1988