Chez Colette

Colette c’était notre voisine, une vieille dame charmante. Elle s’est endormie un soir autour de Noël dernier sur son canapé et a oublié de se réveiller, à 97 ans. Du coup la maison allait être mise en vente et son fils nous l’avait fait visiter.

Ce qui m’avait frappé, c’était dans toutes les pièces, sur tous les meubles, et parfois du sol au plafond, les bouquins, les bouquins, les bouquins. Sur tous les domaines (appris hier par une commerçante qu’elle avait participé au jeu Questions pour un champion avant de perdre la mémoire), mais surtout la mer et la voile ; de Slocum et Gerbault aux navigateurs les plus actuels. Sous l’escalier la collection complète du Chasse-marée. Plein de magazines qu’elle avait gardés. Actualité, et mer, encore et encore. Elle même avait navigué toute sa vie et jusqu’à 80 ans passés.

Cette maison était dans son jus mais habitable, avait une âme, un beau jardin, le prix en était raisonnable : on a déplacé nos quelques meubles et propres bouquins, d’une maison à l’autre — pas seulement à cause des bouquins de mer, mais un peu aussi, quand même, en ce qui me concerne. Les maisons choisissant je pense leur propriétaires, au moins autant que l’inverse.