Grottes du Chaffaud

Je me souviens qu’à cet endroit, j’avais passé des après-midis à gratter la terre seul au fond de la grotte du Puits. C’était évidemment interdit mais j’avais trouvé deux beaux silex taillés ; je les j’ai donné plus tard au curé de Savigné qui était passionné de préhistoire et m’avait permis de dénicher un jeune choucas dans le clocher de l’église pour faire mon Konrad Lorenz.

Maintenant la grotte du Puits est fermée (et défigurée) par une grille, bien qu’il ne doive plus y avoir beaucoup de silex à piller. Mais un jour il faudra bien que j’aille au musée de Saint-Germain, voir le fameux os de renne trouvé au même endroit.

C’était un de mes terrains d’aventures préféré, kayak, spéléo, escalade, acrobranche (le mot n’existait pas, on faisait ça à la sauvage, montée le long de la falaise, descente le long du tronc d’un châtaigner) : on pouvait tout y faire, à un quart d’heure de vélo de la maison des parents.

Et je rêvais de décollages en delta du haut de la falaise, qui doit bien faire ses quinze mètres, mettons vingt avec optimisme. Maintenant je sais qu’il faut quand même une petite pente pour la course d’élan, mais qu’est-ce que j’en ai rêvé, de ce décollage, et le beau vol fait maintes fois en imagination, jusqu’au champ en contrebas de l’autre côté de la rivière (en Poitou quand on a des parents qui n’aiment que la mer, on a les montagnes qu’on peut).

J’ai montré et expliqué à la Plus belle fille du monde, les premières descentes en rappel le long de la falaise, les deux petites grottes superposées qui communiquaient par une étroite cheminée avec un bloc coincé au milieu — n’ai pas osé m’y engager cette fois, c’est pas que j’aie tellement grossi mais la souplesse et l’insouciance ne sont plus ce qu’elles étaient et j’aurais eu l’air malin coincé là-dedans maintenant.

Les grottes du Chaffaud, c’était ma Pierre Saint-Martin à moi.