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L’anniversaire

Publié le 16 février

Je me souviens de ces dimanches après-midi ou Hai et Tam, qui vivaient en appartement au-dessus de leur restaurant avec leurs deux enfants et les parents de Tam, venaient profiter du jardin avec nous. Les enfants jouaient, Hai faisait la sieste le nez dans l’herbe, les filles se racontaient des histoires de filles et de jeunes mères. De Tam dont l’enfance avait été marquée par l’emprisonnement en camp de rééducation et la torture du père, puis la migration comme boat people et dont les gènes étaient imprégnés de confucianisme, on apprenait beaucoup. Hai ne se séparait pas de son téléphone portable pour répondre aux réservations du soir : « restaurant vietnamien, bonjour ! » Aussi on dînait tôt, souvent des grillades, vers les 17 heures. De mon côté j’avais souvent le bip des pompiers à la ceinture et il arrivait que je doive laisser tout le monde sur la pelouse pour un accident ou un secours à personne. Je ne connais pas d’autres photos de ces rencontres pourtant si habituelles jusqu’à leur déménagement quelques années plus tard (mais tout n’est pas encore scanné) ; c’est l’anniversaire d’Yvain le 16 juillet, qui avait dû motiver celle-ci.

En la redécouvrant au scan du négatif, cette photo m’a impressionné à la fois par sa banalité, et par l’expression de jeunesse (on avait pourtant 35 ans, mais la notion de jeunesse-vieillesse est relative à l’âge de celui qui l’évalue) et de bonheur simple, qui s’en dégage. Deux couples amis, les enfants, un jardin. Les tenues et la lumière de l’été (avec un petit coup de flash pour déboucher les ombres), les sourires naturels — sans doute avait-on dit quand même cheese ou ouistiti pour être synchro. Je l’ai envoyée à tout le monde. Et comme ça fait des années et des années qu’on ne s’est pas vus, on a décidé de se retrouver ensemble samedi prochain.
Dans une autre maison et sans les enfants mais avec les deux nouveaux conjoints que la vie nous a apportés. En février pas de barbecue mais il y aura du champagne, des huîtres et toujours un gâteau. Et s’il fait beau, on fera des photos au jardin — cette fois j’essaierai d’être dessus aussi.

L’anniversaire
Isabelle, Hai, Tam et les enfants. Pontivy, 1998