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Olivier

Publié le 31 mars 2015

Je me souviens de cet homme paisible et doux qui fumait des gitanes et jouait du Duke Ellington en autodidacte et en respirant bruyamment. C’était le compagnon de ma tante et je me souviens qu’il m’avait dit à notre première rencontre sur le seuil de la porte « Je m’appelle Olivier, tu te souviendras ? On pourra être copains si tu veux. » J’avais quoi, six ans ?

On a été copains. Je me souviens qu’il gardait toujours à portée de main sur la table ses Gitanes, son briquet, et son petit appareil photo miniature Minox, qui me fascinait ; je jouais avec en douce s’il l’oubliait dans une pièce.

Il n’avait pas eu une enfance très heureuse ; mal aimé de sa mère, une sorte de vilain petit canard ; avait rêvé d’apprendre la musique comme ses sœurs, ce qu’on lui avait refusé. Divorce d’avec sa première épouse, deux grandes filles qu’il ne voyait pas. La vie avec ma tante qu’on dirait peut-être aujourd’hui bipolaire, n’était pas facile non plus ; ils se sont séparés après des années de vie commune. Et on n’a plus eu de nouvelles, ni d’adresse, alors que l’on n’avait rien contre lui, bien au contraire, mes grands-parents, mes parents l’aimaient bien aussi. Forcément mort aujourd’hui. Il me reste son recueil de Duke Ellington, et aujourd’hui encore j’ai moi aussi un Minox sinon à portée de main, jamais bien loin, et à chaque fois, un salut amical.

Olivier
Civray, 1986